Cinéma : "La Syndicaliste", ou comment discréditer une histoire vraie

Déléguée syndicale CFDT, Maureen Kearney tente d’alerter sur un secret d'État lié au nucléaire en France, jusqu’au jour où elle se fait violemment agresser chez elle. Retour sur un film à l'intrigue puissante qui, pourtant, n'a pas été convaincant.

Cinéma : "La Syndicaliste", ou comment discréditer une histoire vraie
Maureen Kearney (à gauche), aux côtés de celle qui interpréta son rôle à l’écran, Isabelle Huppert. ©Guy Ferrandis

Elle est fidèle à son poste, y consacre toute sa vie. Mais en décembre 2012, sa vie bascule. Un informateur secret qui travaillerai chez EDF, des appels menaçants à répétition, un vol, un viol. Maureen Kearney, syndicaliste pour un groupe français spécialisé dans l’énergie nucléaire, Areva, se lance dans un combat que personne ne dit connaître, que personne ne reconnaît.Malgré les preuves, Luc Oursel (nouveau directeur adjoint d’Areva qui succéda à la créatrice du groupe Anne Lauvergeon) n’admettra jamais cette proximité déloyale entre EDF, Areva et la société chinoise CGNPC. Et pour se faire entendre, la syndicaliste tente le tout pour le tout, quitte à risquer sa vie.

Un scandale d'Etat

 Enfin, c’est ce que l’on croit, au début du film. Et peut-être jusqu’à la fin même. Car malgré le fait que ce thriller, basé sur le livre éponyme de Caroline Michel-Aguirre (journaliste à l’Obs), éclaire des zones d’ombres de l’affaire, les faits d’agression n’ont jamais été établis. Comme l’explique Libération, “La plupart des articles de presse publiés à son sujet [...] considèrent que les faits d’agression sont établis. Déformant, de fait, la vérité judiciaire.” Et ce n’est pas le dernier film de Jean-Paul Salomé qui vous donnera le fin mot de l’histoire. 

Un casting important mais un scénario assomant

Sans vous spoiler, aborder l’ambiance du film semble tout de même inévitable. Musique “stressante”, gros plans et scènes silencieuses à répétition, le spectateur finit pourtant par se lasser. Des incohérences sur les réelles pensées des personnages perdent le spectateur. Un coup avec Mme Kearney, un coup contre. Un coup fort, un coup faible. Et c’est peut-être parce que cette “histoire vraie” n’a jamais eu de fin concrète que le film parvient si peu à tenir en haleine le spectateur. Et la déception est d’autant plus grande quand on analyse ce casting pourtant XXL. Isabelle Huppert qu’on retrouvait il y a deux ans dans “La Daronne” du même réalisateur, Marina Foïs, Yvan Attal (Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants), François-Xavier Demaison ou Grégory Gadebois (césarisé pour son rôle de Tony dans “Angèle et Tony”), l’affiche était belle. Des acteurs et actrices talentueux réunis dans une soupe fade qui n’en finit plus. 

Une affaire inconnue qui aurait mérité un docu

Si le scandale d’Etat est haletant, pour la rédaction le film manque un peu de dynamisme. Même si les silences et les retours en arrière permettent de réfléchir à l'intrigue, certaines séquences deviennent un peu longues au fur et à mesure pour un film qui dure plus de deux heures. Une enquête avec des témoignages sur cet énorme dossier nous aurait davantage maintenus éveillés pendant ces deux heures.L’affaire très méconnue aurait mérité d’un film documentaire digne de ce nom comme celui de Marie Portolano avec “Je ne suis pas une salope, je suis journaliste”. Aujourd'hui, le nucléaire est un sujet de premier plan et fait l’actualité régulièrement c’est pourquoi on reste d’autant plus sur notre faim. Les affaires sont passionnantes mais le film survole un peu trop les enjeux de ces grandes manœuvres qui ne facilitent pas la compréhension.  

Pour la Redac', c’est un 2,3/5. 

Kim Lo-a-tjon et Quentin Gaboriau